Des besoins universels
Méta-besoin et besoins fondamentaux
Les travaux de la démarche de consensus ont conduit à considérer que la satisfaction du besoin de sécurité physique et affective conditionnait la satisfaction des autres besoins et en conséquence, la démarche de consensus a retenu « le besoin de sécurité » comme méta-besoin, tout au long de la vie, intégrant les besoins physiologiques et de santé, le besoin de protection et le besoin de sécurité affective et relationnelle. Par ailleurs, ont été également retenus comme besoins fondamentaux universels, le besoin d’expériences et d’exploration du monde, le besoin d’un cadre, de règles et de limites, le besoin d’estime de soi et de valorisation de soi et le besoin d’identité. L’ensemble de ces besoins constitue « la carte des besoins fondamentaux universels de l’enfant ».

La carte des besoins fondamentaux universels de l’enfant
Source : Démarche de consensus sur les besoins fondamentaux de l’enfant en protection de l’enfance, page 13
Les besoins fondamentaux de santé physique et psychique
Les travaux de la démarche de consensus ont posé le principe selon lequel, pour grandir, s’ouvrir au monde, l’enfant a besoin d’une « base de sécurité interne » suffisante qui lui permettra d’explorer et d’acquérir des compétences (physiques, psychologiques, langagières, d’apprentissage, d’estime de soi et de relations aux autres) favorables à son autonomie et à sa socialisation.
Le SDEF 2025-2029 met l’accent sur la dimension autour des besoins physiologiques et en santé. Pour l’Organisation mondiale de la santé (OMS), « la santé est un état de complet bien-être physique, mental et social et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité ».
La santé se conçoit dans une approche globale, de soins et de prendre soin. La satisfaction des besoins physiologiques de l’enfant est une des conditions de son développement. Le rapport issu de la démarche de consensus insiste sur le fait que l’enfant a besoin que sa santé fasse l’objet d’une attention régulière, et ce, quel que soit son âge.
La santé de l’enfant relève de la responsabilité des parents d’une part, des soignants d’autre part, lesquels ont les compétences pour informer et accompagner les familles dans un « savoir prendre soin de soi » (accès à l’information sensible telle que nutrition, sexualité, dépendances diverses – écrans, produits, etc.).
Les besoins fondamentaux de découverte du monde
Le rapport issu de la démarche de consensus sur les besoins fondamentaux de l’enfant souligne que l’enjeu du besoin d’expériences et d’exploration du monde « est le développement des compétences motrices, réflexives, expressives et ludiques de l’enfant ».
« Il en va ainsi des expériences corporelles et physiques : besoin de bouger et d’agir pour développer sa musculature, son endurance, sa coordination, son adresse, acquérir le sens de l’engagement, des règles et du jeu en équipe dans le cadre d’une activité sportive ou théâtrale, etc. »
Si elles sont généralement introduites, en premier lieu, par ses parents, les expériences nouvelles de l’enfant peuvent également être déployées par de nombreux acteurs. Dès le plus jeune âge, les espaces d’accueil de la PMI, les Lieux d’accueil enfants/parents (LAEP), les crèches… ont un rôle essentiel à jouer pour soutenir les expériences nouvelles du tout-petit. À mesure qu’il grandit, nombre d’acteurs peuvent y participer tels que l’école, les lieux de loisirs et de culture, les clubs de sport, les parrains de proximité, les mentors, etc.
Quel que soit le milieu dans lequel évolue l’enfant, il est essentiel de travailler son ouverture au monde et de lui proposer, ainsi qu’à ses parents, des activités à l’extérieur du domicile familial.
Si certains aspects du besoin d’expériences et d’exploration du monde sont communs à tous les enfants, il est étroitement lié au développement de l’enfant et donc à son âge.
Les besoins fondamentaux de cadre
Les notions de cadre et de limites renvoient à la question des lois et des règles, ainsi qu’à celle de l’éducation, de la contrainte, de la transgression et de la sanction. En effet, nul ne peut vivre en société sans respecter ces normes, qu’elles soient légales ou sociales. Elles fondent la société et permettent de vivre en harmonie les uns avec les autres : les normes sociales définissent ce qu’il est acceptable de faire ou de ne pas faire (manière d’agir, de parler) en distinguant les comportements conformes aux attentes de ceux jugés « déviants ».
L’acquisition des codes sociétaux, des lois et des règlements s’ajoute à des principes de précaution face à un danger potentiel et des savoir-être, qui s’apprennent en grandissant. L’enfant a donc, dès sa naissance, besoin qu’un cadre éducatif structurant soit posé. Le cadre va permettre à l’enfant de mieux appréhender ce qui l’entoure, d’intégrer les règles sociales, la propreté, le bien, le mal, etc. Ainsi, la question du cadre, des règles et des limites n’est pas une question de discipline mais renvoie à un processus plus complexe, celui de la socialisation. Les limites sont nécessaires à la construction psychique de l’enfant. Elles doivent lui permettre de passer du plaisir au principe de réalité, de considérer l’autre en tant que personne distincte de lui et d’intégrer que, si nous pouvons faire beaucoup de choses, nous ne pouvons pas réaliser tous nos désirs pour autant. Les règles et les limites doivent permettre d’assurer la sécurité de l’enfant tout en lui laissant la possibilité d’expérimenter, de développer sa capacité à savoir s’orienter et user de sa liberté.
Le besoin de cadre et de limites ne doit pas s’opposer mais au contraire s’articuler avec le besoin d’expériences et d’exploration du monde. Ces besoins sont complémentaires.
Dès lors, le cadre éducatif posé doit être structurant, clairement défini, mais souple. Ainsi, le cadre, les règles et les limites doivent être posés de manière claire et ne pas changer continuellement. Des règles stables sont un repère et permettent à l’enfant de se sentir en sécurité. A l’inverse, une absence de règles ou des règles qui changent sans cesse insécurisent l’enfant. L’enfant a besoin de comprendre concrètement les attentes de l’adulte et les conséquences pour lui s’il ne respecte pas les règles et les limites. Le cadre doit, par ailleurs, tenir compte du rythme de l’enfant. Les règles et les limites doivent être adaptées en fonction de l’âge et de l’autonomie de l’enfant et évoluer avec lui.
Les besoins fondamentaux d’identité et d’estime de soi
L’estime de soi comme « la conscience de la valeur du moi ». Il s’agit d’une évaluation intime de soi qui prend appui sur la perception qu’une personne a d’elle-même, ainsi que du sentiment d’être unique et d’avoir de l’importance. Le rapport issu de la démarche de consensus sur les besoins fondamentaux de l’enfant en protection de l’enfance rappelle à ce titre que l’enfant a besoin d’avoir « une image positive de soi pour pouvoir se faire confiance, corrélée au sentiment de compétences et à la capacité d’affirmer des préférences, des choix, et avec l’âge la capacité à projeter une trajectoire, la capacité à être empathique et construire des relations stables et la capacité à prendre soin de soi ». Les croyances et les sentiments liés au « soi » jouent un rôle clé dans le développement de l’enfant, et ce dès les premiers mois. Le besoin d’estime de soi et de valorisation de soi permet la construction d’une image positive de soi-même qui favorise la confiance, la capacité à s’affirmer et à se projeter. L’estime de soi va favoriser l’émergence d’une confiance dans la relation aux autres et à soi-même.
La construction de l’identité est un processus. L’identité évolue tout au long de la vie en fonction des expériences vécues par un individu et des différents groupes sociaux auxquels il appartient. Le besoin d’identité recouvre trois dimensions cumulatives :
- être identifié comme un être unique ;
- l’appartenance, c’est-à-dire faire partie d’un groupe ;
- la filiation qui signifie pour la personne de savoir d’où elle vient.
L’enfant a donc besoin, dès le plus jeune âge, d’appréhender ces trois dimensions afin qu’il puisse se construire comme un individu à part entière.
Les besoins fondamentaux dans la loi
L’article L. 112-3 de la loi du 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfance a inscrit les besoins fondamentaux dans le cadre légal : « La protection de l'enfance vise à garantir la prise en compte des besoins fondamentaux de l'enfant, à soutenir son développement physique, affectif, intellectuel et social et à préserver sa santé, sa sécurité, sa moralité et son éducation, dans le respect de ses droits. »